MESSAGE DE NOËL 2007
MESSAGE DE NOËL 2007
Chères familles, chers amis, en ce 16 décembre 2007, à minuit !
Nous commençons la dernière semaine de l'Avent. Nous allons bientôt fêter ce qui est au Congo la plus belle fête liturgique de l'année. Je dois vous dire que la joie de Noël n'est pas évidente dans ce "milieu" de souffrances où ...j'essaie d'être dans cet hôpital de Lubumbashi : "l'aumônier" depuis près de 4 ans.
Beaucoup de malades sont loin de leurs familles. Beaucoup souffrent de la faim, et certains attendent depuis des mois : la guérison qui ne vient pas. Des enfants de la rue, blessés dans leur chair par des accidents stupides, et par des chauffards qui ont pris la fuite, sans la moindre visite...même pas de leurs amis de la rue...des malades du V.I.H. pour lesquels nous sommes impuissants en pensant aux millions dans le monde qui attendent...ce qu'on n'ose pas toujours leur dire !
Jeudi prochain (le 20 décembre) j'ai invité les malades qui le désirent et qui partagent notre foi chrétienne, à une veillée de prière, dans notre chapelle, avec le sacrement des "malades". Comme je voudrais dire à tous ces malades, ce que nous avons prêché ce matin à la messe !....comme Jésus qui répondait aux messagers de Jean Baptiste qui passait son dernier "Avent" dans un cachot d'Hérode, et qui venaient lui demander « pour finir, es-tu le Messie...promis, ou devons-nous attendre un autre ??? » Lui, Jean Baptiste, qui a eu le courage de reprocher à Hérode, en public, sa vie scandaleuse, qui allait lui coûter quelques jours après...sa tête. Il n'a pas osé lui dire : « si vraiment tu es le Messie...ne pourrais-tu pas venir me retirer de ce cachot, que je n'y croupisse plus, et que je puisse continuer ce magnifique boulot d'annoncer que le Royaume promis est enfin arrivé !.. ». Qu'est-ce que Jésus lui a répondu : "allez dire à Jean que les aveugles voient, que les sourds entendent, que les paralysés marchent, que les lépreux sont purifiés .(évangile du 3ème dimanche de l'Avent, Mathieu II, 2-11) , je voudrais ajouter toutes les souffrances que je côtoie chaque jour, que les sidéens sortent guéris, que les tuberculeux arrêtent de tousser, que les malades atteints de malaria arrêtent de trembler , et toutes les autres , et j'en passe : fièvre typhoïde, cancer, tumeurs inguérissables ... qu'ils sautent hors de leurs lits et qu'ils rentrent guéris chez eux, dans leur famille.
Alors, oui ce serait un magnifique Noël, et je retrouverais ce que j'ai connu pendant des décennies, dans la brousse de ce grand et beau pays du Congo, où j'ai vécu plus de quarante Noël : une grande joie, avec des chants qui vous réchauffaient le coeur. Ce qui me "console" (consolation bien maigre...), c'est de savoir qu'il y a des endroits où la souffrance est encore pire de ce qu'on découvre ici, mais surtout de savoir qu'il y a des hommes et des femmes pleins de courage qui font tout pour diminuer ces souffrances.
Je viens de voir à la T.V. une "bonne"émission (c'est assez rare), une rétrospective de la vie d'une grande dame : Simone Veil, présentée par un infatigable : Michel Drucker ; j'étais fort impressionné par ce qu'elle a vécu, comme juive, rescapée des camps de concentration. Quel courage, quelle noblesse, elle a même été félicitée...il y a de quoi (et presque en direct) par deux anciens présidents de la France avec qui elle avait oeuvré. Je l'ai vue pleurer en Allemagne, lors d'un "pèlerinage" devant des milliers de noms de ceux et celles qui n'ont pas eu la chance qu'elle a eue. J'ai été bouleversé d'apprendre que c'étaient surtout les enfants qui étaient supprimés les premiers... avant les adultes (comme le massacre des enfants de Bethléem, au lendemain du premier Noël !). Je pense à ses "Noël" qu'elle a du vivre pendant ces années qu'on voudrait oublier. C'est beau, qu'à côté d'elle un ancien président français ait demandé pardon pour les collabos qui ont participé à cet horrible massacre. Avec tous ceux et toutes celles qui combattent pour une vraie paix et qui s'efforcent partout dans le monde de diminuer toutes ces souffrances, pour se battre pour la justice, contre le terrorisme, et la suppression de toutes ces horreurs qu'on voit presque tous les jours.
Alors oui, ce sera possible de souhaiter un heureux et joyeux Noël...que je vous souhaite de tout coeur.
Baudouin.
P.S.
J'ajoute un petit récit d'une enfant handicapée, c'était dans mon homélie de ce matin.
Ce matin, dimanche,16 décembre 2007, dans notre chapelle de l'hôpital, il y avait des petits handicapé(e)s dans leurs voiturettes, je devais leur dire que c'est la semaine avant Noël qui doit être une semaine d'amour.
Je pensais à une victime d'un barbarisme vécu ici à Lubumbashi que nous avions aidée pendant des mois, un jeune qui avait volé du fil électrique, on lui avait brûlé les mains et les pieds avec de l'essence. Il lui restait un pouce ! Sur lequel on a pu lui fixer une main qui pouvait...pincer des objets, entre autre une tartine ! Pendant mon "sermon"... je me suis souvenu d'une histoire que j'avais racontée il y a des années lors d'un témoignage au collège Cardinal Mercier à Braine l'Alleud. La voici :
Un grand bruit de vitre cassée retentit dans une école, c'était une grande vitre, qui venait d'encaisser un ballon de foot. Des milliers de petits morceaux jonchaient le sol, les petits ont essayé de les ramasser mais c'était dangereux car les morceaux étaient coupants, alors, sortie du rang, une petite fillette handicapée, sans mains avait une prothèse d'une main au bout d'un moignon avec une pince métallique. Elle dit à sa maîtresse, Madame, laissez-moi faire, c'est mon heure, enfin, je peux me rendre utile....!
Elle pinça tous les morceaux, les plus coupants, et elle était fière et heureuse. Tous les petits avec la maîtresse : applaudirent. Elle prenait en une fois conscience que malgré son handicap, elle pouvait être très utile, et même indispensable.
La vieillesse peut-être aussi un handicap, surtout quand on a un pied qui ne peut plus me porter !
Mais elle est vie éternelle pour ceux qui aiment et qui sont aimés.
En cette veillée de Noël, je rends grâces à Dieu, après l'avoir fait devant vous le 21 Avril 2007 à Gentinnes pour mon jubilé...d'or, 5O ans de prêtrise, presque tous au Congo, parce qu'Il a donné un sens à ma vie. Je le remercie pour toutes les joies que j'ai reçues, et épreuves que j'ai pu supporter, grâce à Lui.
« Dieu a tant aimé le monde qu'Il a donné son Fils unique, pour que tout homme qui croit en Lui, ne périsse pas mais qu'il ait la vie éternelle », Jean 3,16.
Bonne et heureuse fête de Noël, de tout coeur avec vous.
Baudouin.